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Vous êtes considéré comme un interprète privilégié de Chopin,
Rachmaninov ou Fauré. A quel moment avez-vous abordé le piano de
Schumann ?
En réalité, au Conservatoire de Paris – où l’on jouait peu demusique française –, j’ai
fréquenté Beethoven, Chopin, Liszt et Schumann... Depuis lors, l’œuvre pour clavier
de Robert Schumann a toujours été présente dans mon esprit, mais plutôt les
Etudes Symphoniques
, très à la mode à cette époque et le
Carnaval
que l’on inscrivait
régulièrement au programme des concerts. J’ai abordé les
Kreisleriana
assez tôt
sans beaucoup les jouer ; en revanche, j’hésitais àm’impliquer en tant qu’interprète
dans la
Fantaisie
. Peut-être ne la sentais-je pas suffisamment dans mon corps. Lors
de mes études avec Pierre Sancan qui appréciait ce compositeur et faisait travailler
les
Scènes d’enfants
ou les
Etudes Symphoniques
, on était davantage intéressés par
des questions liées à la morphologie comme le problème du quatrième doigt de
la main droite que Schumann avait atrophié en le ligaturant afin d’en obtenir une
meilleure indépendance ! On n’entrait pas dans des considérations psychologiques,
mais la réflexion portait davantage sur la qualité de toucher ou sur le caractère
symphonique du piano de Schumann, d’une densité toute particulière difficile à
transmettre sur le plan orchestral.
JEAN-PHILIPPE COLLARD