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6 SCHUMANN_Fantaisie & Kreisleriana

Fantaisie en ut majeur op. 17

Schumann dut affronter les pires tourments pour se faire accepter par le père

de la jeune et célèbre virtuose Clara Wieck dont il était follement amoureux. En

1836, Friedrich Wieck – son professeur de piano – impose au futur couple une

année de séparation douloureuse. Toutes les œuvres écrites alors sont marquées

par la personnalité de Clara (son absence, l’attente passionnée difficilement

vécue). La

Fantaisie op. 17

est en fait la contribution de Schumann au projet de

Liszt de faire ériger une stèle à Bonn pour commémorer le dixième anniversaire

de la mort de Beethoven. Réussite absolue dans le domaine de la grande forme

pour le clavier, cette partition en trois mouvements s’imposera comme un jalon

essentiel du répertoire pianistique, emblème de l’âme romantique. L’immense

premier mouvement (« à jouer d’un bout à l’autre d’une manière fantastique

et passionnée ») est le plus développé et le plus riche de contenu comme « une

approximation de sonate » (Marcel Beaufils). En dépit de la violence du ton et des

fréquentes ruptures du discours, se maintient constamment une tension fébrile

dès la phrase d’ouverture « long cri d’amour envers Clara » qui ne s’interrompt

provisoirement qu’avec l’apparition d’une mélodie, citation du cycle de lieder

An die

ferne Geliebte (

À la Bien-aimée lointaine

)

de Beethoven dont Liszt avait réalisé une

transcription pour son instrument, double hommage au dédicataire de la

Fantaisie

et à Clara (car elle est réellement la Bien-aimée lointaine !). L’espérance et la lumière

s’invitent enfin, mais peut-être s’agit-il simplement d’un hommage à la

Sonate op. 111

de Beethoven qui se clôt également dans le grave du piano en un hymne apaisé à

la nuit.