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PASCAL AMOYEL

Quelque chose s’était irrémédiablement brisé, dont

les trois accords enportique,quasi beethovénien,qui

ouvrent la Polonaise-Fantaisie témoignent, même

adoucis par les figures magiques qui leur succèdent.

Franz Liszt n’y comprit goutte, y voyant l’aveu d’une

dépression et partant un langage décousu. Alors

que Chopin, comme il le fera exactement dans ses

ultimesmazurkas, y largue simplement les amarres :

son piano est enfin libre, un monde, un univers où

l’indécision est une vertu, l’invention une règle,

l’échappée belle une morale, la fantaisie un but et

le temps historique un leurre. Mine de rien, le piano

moderne était né, Debussy n’avait plus qu’à paraître.