

MENAHEM PRESSLER 7
Vous avez quitté l’Allemagne à la veille de la Seconde Guerre
mondiale et, comme beaucoup de musiciens venus d’Europe,
vous avez transmis votre art aux Etats-Unis. Revendiquez-vous
l’influence d’une tradition musicale spécifique ?
Bien entendu. Ce que vous appelez la tradition, c’est une histoire dans laquelle
on s’inscrit, marchant dans les traces des interprètes qui, avant nous, ont joué et
enregistré les œuvres qui figurent sur ce disque. Artur Schnabel, Wilhelm Kempff,
Edwin Fischer, n’étaient pas « grands » parce qu’ils jouaient du piano, mais parce
qu’ils recherchaient la beauté et la grandeur dans la musique. C’est une tradition
viennoise qu’illustre ce programme. La ville y joue un grand rôle, comme ce sera
plus tard le cas à Leipzig pour Mendelssohn et Schumann.
Que pensez-vous alors de la phrase attribuée à Gustav Mahler :
“Tradition ist Schlamperei” (
«
La tradition est une cochonnerie
»
) ?
Je crois que ce que voulait dire Mahler, c’est que l’imitation servile de ce que l’on
entend, équivaut à passer une veste qui n’est pas la vôtre ! Chacun doit trouver sa
voie.