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13 Que vous inspire, alors, la fraîcheur du Scherzo de la sonate ? Dans cet enregistrement, je le joue moins vite que d’habitude et dans l’esprit d’une danse des anges qui se place en retrait, quêtant la pureté d’une Kinderszene , miroitant entre les tonalités de Si bémol mineur et majeur. Schubert regarde une fois encore tout ce que Vienne lui a refusé. La valse ainsi suggérée le frappe de coups de couteau. Une valse viennoise empoisonnée, « à la Max Ophüls », insistante jusque dans les échos de la note Sol . Deux cris se produisent (Fa mineur) puis des unissons successifs éclatants entre des passages techniques diaboliques en concert : ils nous mettent en danger parce que le compositeur est en danger. Puis, voici, un tourbillon de joie, de bonheur, presque. Schubert sait que tout est fini. Une ou deux fois, je me suis autorisé à utiliser la tessiture de nos pianos modernes et que le pianoforte de Schubert ne possédait pas, mais vers laquelle il tend, à l’évidence. Rien, en vérité, n’est improvisé chez Schubert. Parfois, il en donne l’illusion, le change. Tout est « orchestré » sans qu’il n’atteigne jamais le paroxysme car il lui faut sans cesse repousser l’inévitable, gagner du temps. Seul, le finale faustien avec sa cavalcade et ses syncopes à la main gauche achève la course à l’abîme du Wanderer . JEAN-MARC LUISADA

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