LDV88-9

Sur son manuscrit, Bach a écrit « Sei Solo ». En italien, « sei » veut certes dire « six », mais le pluriel devrait être « soli ». Et plutôt que « six solos », on a parfois lu ces deux mots comme la contraction de « Tu sei solo », donc « Tu es seul ». Qu’en pensez-vous ? C’est là que résident à la fois la puissance et le problème. En jouant cette musique, on ressent la plénitude des questions existentielles, cosmiques posées par Bach, et en même temps la solitude. Ce sentiment est la seule manière de prendre conscience de l’abîme, de l’infini. Un sentiment d’absolu qui devient pour moi de plus en plus insurmontable. C’est encore plus le cas dans ces Sonates et Partitas que dans les Suites pour violoncelle ou les œuvres de clavier, car leur difficulté est extrême, notamment dans les fugues des sonates aux dimensions improbables, au vu de la nature du violon. C’est de l’ordre de l’utopie, la quadrature du cercle sur cet instrument qui n’est pas naturellement polyphonique. 5 DAVID GRIMAL

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