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10 BEETHOVEN_TRIOS « LES ESPRITS » & « À L’ARCHIDUC » Est-ce que cette idée d’un compositeur monolithique serait liée à l’image qu’on lui donne dans l’enseignement de la musique ? David Grimal : Il y a toute une idéologie autour de la « machine Beethoven », autour du Beethoven « rythmicien ». Cette esthétique d’un Beethoven vertical et architectural a été beaucoup colportée par les quatuors à cordes, et notamment par Walter Levin, fondateur et premier violon du Quatuor LaSalle, qui a été un grand professeur de musique de chambre et a formé à peu près tout ce qui existe en quatuor moderne. Walter Levin défendait une idéologie très forte qui était celle de l’association de Beethoven avec l’invention du métronome, cette idée d’une motricité de cette musique. Cette approche a ensuite été récupérée puis amplifiée par les adeptes des instruments d’époque et des interprétations historiquement informées : ils se sont mis à jouer les symphonies de Beethoven de manière très rythmique, parfois presque comme de la techno. C’est encore la tendance de beaucoup d’orchestres avec lesquels je collabore aujourd’hui, le réflexe motorique, l’usage de la force. Je suis obligé de leur dire à chaque fois : « Beethoven, c’était après Haydn, pas après Karajan ». J’y vois les restes d’une forme de propagande qui a été faite sur cette musique, liée au fantasme du « surhomme ».

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