LDV600-6

Aujourd’hui, les musiciens bougent trop, versent à l’excès dans la contemplation de leur propre beauté. Réussissent-ils un arpège ? Ils tiennent à le faire sentir. Un accord vibre-t-il de façon particulièrement photogénique ? On s’accorde un petit arrêt selfie avec pour « profiter du paysage ». Cela est impossible aux Ysaÿe. Ils sont du côté d’un Brendel qui a des tessons de bouteille à la place des lunettes et joue du Beethoven sans le secours d’un circassien qui dompterait un tigre en même temps, ou d’une équilibriste en plumes d’autruche qui ferait du hula hoop pour « actualiser » ces musiques, supposément insuffisantes en soi. Sans fard ni artifice, le Quatuor Ysaÿe aborde l’un des sommets les plus aboutis de l’esprit humain. Et franchir ce pas, c’est sortir de l’élégance. Car chez Beethoven la pulsation fait partie de la musique. Elle impose le cadre de la rigueur et un inconfort qui crée la musique en devenir de manière objective, indépendante des soupirs personnels, des retards « divins », de la pâmoison facile qui surjoue l’émotion. 11 QUATUOR YSAŸE

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