LDV49.1

30 MESSIAEN_L'ŒUVRE D'ORGUE On peut parfois s’en étonner : malgré leurs différences stylistiques, Messiaen admirait et respectait Marcel Dupré. Auprès de ce maître, il apprit ce qu’était l’orgue symphonique, son esthétique et sa technique. L’orgue de la Trinité (duquel, très jeune, il fut nommé titulaire) fut par ailleurs pour Messiaen un champ d’expérimentation qui toute sa vie, demeura cher à son cœur. Certaines particularités de cet instrument (Piccolo et Tierce du positif, fonds de 16 pieds à tous les claviers) marquèrent durablement ses registrations. Si l’esthétique de l’orgue symphonique influence fortement les premières œuvres deMessiaen, il s’en écarte progressivement au cours de son évolution, y revenant quelque peu dans ses dernières compositions. C’est dans le Livre d’Orgue qu’il prend le plus de distance avec ce style. C’est également dans ce cycle que Messiaen se livre aux recherches les plus radicales : en effet, trois pièces peuvent être considérées comme intégralement sérielles sur le plan des hauteurs, des durées et même des timbres. Trois pièces ( Reprises par interversions , Chants d’oiseaux et Soixante-quatre durées ) utilisent l’orgue en quatre plans distincts colorés différemment ; trois autres pièces ( Les mains de l’abîme et les deux pièces en trio) l’utilisent en trois plans clairement différenciés ; une seule ( Les yeux dans les roues ) l’utilise dans sa totalité. Ainsi, d’unemanière inattendue (et peut-être sans le savoir), Olivier Messiaen rejoint les pratiques de l’orgue classique français avec ses duos, ses trios, ses quatuors, ses fugues à cinq et ses dialogues. Cette écriture instrumentale était certes déjà présente dans ses œuvres précédentes, mais elle trouve là son épanouissement.

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