6 RACHMANINOV | PRÉLUDES Cette terre est-elle la source d’inspiration de ses Préludes ? « Si j’évoque l’amour de la terre, c’est parce que je l’ai en moi » écrit-il. Elle y participe pour beaucoup, mais elle n’est pas la seule. Rachmaninov part souvent se réfugier en dehors de Moscou, faisant de longues pauses à la campagne. Il éprouve le besoin de s’extraire de la vie urbaine pour trouver la quiétude dont il a besoin pour composer, en contact avec la nature. Celle-ci l’inspire indéniablement. Il est souvent question du domaine familial d’Ivanovka dans ses Réflexions et souvenirs que je cite à nouveau : « Ivanovka c’était la steppe, et la steppe est comme la mer, sans limites. Au lieu de l’eau, une immensité de champs de blé, d’avoine, d’un horizon à l’autre ». Je connais cette campagne : au milieu de ces champs dépourvus de présence humaine, on ressent un grand sentiment de solitude, sentiment pour lequel le compositeur nourrit un penchant. Ses Préludes en contiennent des évocations. Ils sont des tableaux, tous différents. Rachmaninov aurait pu les appeler Préludes-Tableaux, de la même façon que les Études-Tableaux composées après eux. Ils ont chacun une couleur, un état, une impression singulière : dans les septième et huitième de l’opus 23 on peut entendre le vent dans les blés, mais dans deux ambiances, deux environnements complètement différents. Avec sa basse ondoyante, le cinquième de l’opus 32 a aussi une atmosphère très particulière. Et si Rachmaninov était véritablement un impressionniste ? C’est le sentiment que j’en ai en les jouant.
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