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12 DEBUSSY_12 ÉTUDES • LE MARTYRE DE SAINT SÉBASTIEN Vous incluez dans ce programme une page contemporaine des Études , l’ Élégie de 1915, pièce triste et résignée, comme repliée sur elle-même ; puis Les Soirs illuminés par l’ardeur du charbon de 1917, au titre emprunté à Baudelaire ( Le Balcon ), qui sonne comme un adieu à ce monde sonore et à son œuvre ; on y trouve d’ailleurs une citation extraite des Sons et les parfums tournent dans l’air du soir , comme s’il fallait renouer une dernière fois avec cet univers symboliste des Préludes . Quel regard portez- vous sur ce dernier Debussy et son abandon poignant au monde ? Après la parenthèse d’énergie vitale de l’été 1915, dernière grande vague créatrice de Debussy, celui-ci retombe dans la profonde dépression qu’il connaît depuis le début de la guerre, accentuée encore par le mal inexorable qui le ronge. Il compose l’ Élégie en décembre au moment où il doit subir une grave opération. Ces quelques mesures sombres, comme prostrées, se font l’écho de ce désespoir, et la mélodie de main gauche, accablée et infiniment triste, sous des harmonies incertaines, est l’une des choses les plus poignantes que Debussy ait écrites. On a longtemps cru qu’on tenait là son ultime adieu à l’instrument.

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